Notre collègue et ami, le professeur Normand Marceau, est décédé le 4 avril 2022, à l’âge de 79 ans.
Normand a obtenu un Baccalauréat en génie physique en 1966, au Département de physique de la Faculté des sciences et de génie à l’Université Laval. En 1971, il a obtenu un doctorat en biophysique médicale de l’Université de Toronto. Cette même année, il a joint la Faculté de médecine de l’Université Laval. De 1971 à 1981, ses activités de recherche se sont déroulées au Centre de Recherche du CHUL. Il a par la suite été membre fondateur d’un nouveau centre de recherche multidisciplinaire à L’Hôtel-Dieu de Québec, en compagnie de cinq collègues possédant des expertises variées et applicables à la recherche sur le cancer. En collaboration avec le regretté Dr Luc Bélanger, il fut donc un pionnier qui a travaillé avec acharnement au bon fonctionnement et à la croissance du Centre pendant plusieurs années.
À titre de chercheur de l’axe Oncologie, une facette importante du rôle de Normand Marceau fut sans contredit son leadership pour le recrutement de chercheurs, qui a mené à la création d’une expertise locale en biologie cellulaire et signalisation du stress, qui a produit des découvertes de grand impact et qui donne maintenant au Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval une reconnaissance internationale dans ce domaine.
Ses diverses réalisations ont toujours été faites avec une rigueur et une détermination exceptionnelles. Néanmoins, elles ont été réalisées dans le respect constant de ses collègues. À cet égard, Normand Marceau a été un exemple de professeur-chercheur généreux et aidant. Plusieurs se souviendront de ses conseils d’experts, teintés d’une sagesse qui lui était particulière. Il a mené une carrière académique et de recherche remarquable. Il se doit d’être reconnu non seulement comme un des membres fondateurs du Centre de recherche, mais aussi comme un joueur de premier plan dans le développement et la reconnaissance nationale et internationale de celui-ci.
Normand Marceau a travaillé avec acharnement au bon fonctionnement et à la croissance du Centre de recherche pendant plus de 45 ans. Il a constamment œuvré pour le bien du Centre et des chercheurs, leur permettant, entre autres, d’avoir accès aux meilleures technologies d’imagerie cellulaire. La plateforme d’imagerie sur le site de L’HDQ est à son image : utile, accessible et performante. Les scientifiques qu’il a formés sont nombreux, et plusieurs sont maintenant professeurs-chercheurs indépendants en milieux académiques et/ou hospitaliers.
Normand Marceau a laissé sa marque au niveau international dans le secteur de la différenciation des cellules hépatiques en lien avec le développement normal et cancéreux dans le foie, ainsi que dans le domaine des filaments intermédiaires (FIs), plus spécifiquement sur le caractère multifonctionnel des kératines de l’épithélium simple. Son intérêt initial pour les kératines venait du fait qu’elles forment une famille multigénique de protéines s’exprimant en paires selon le type de cellules et le stade de différenciation, d’où leur utilité pour le typage des cellules épithéliales normales et cancéreuses. Toutefois, les FIs de kératines des kératinocytes étaient déjà connus pour leurs propriétés viscoélastiques et de là, son équipe s’est intéressée à leurs fonctions, tant mécaniques que non-mécaniques, en focalisant sur les cellules hépatiques. Dans les dernières années, son équipe s’attardait à étudier l’implication des FIs K8/K18 dans la régulation de la migration, du métabolisme et de la mort par apoptose de ces cellules, dans un contexte de signalisation cellulaire. Ses récentes données mettaient en lumière l’action modulatoire des FIs K8/K18 au plan des radeaux lipidiques à travers des voies de signalisation régulant la formation et la distribution de filaments d’actine à la membrane plasmique. La portée significative de cette recherche se retrouve dans le contexte de maladies hépatiques, en particulier le cancer du foie. Récemment, le professeur Marceau avait été invité à réunir ces différents aspects au sein d’un même ouvrage, en format numérique. Intitulé « Intermediate Filaments », cette publication est destinée aux doctorants, aux stagiaires postdoctoraux et aux chercheurs.
Son expertise a également été sollicitée comme éditeur associé pour la revue scientifique « Biochimie et biologie cellulaire », de 1993 à 2011, alors qu’il agissait aussi régulièrement, depuis les trois à quatre dernières décennies, comme évaluateur pour différents journaux internationaux. De telles réalisations ont mené à près de 105 publications et à plus de 5000 citations, à un nombre enviable d’articles de revue et à plus de 250 résumés de communication.
Pour toutes ces raisons, il a été récipiendaire du prix Diamant Recherche-Carrière, la plus haute distinction de notre organisation. Il a aussi été nommé chercheur émérite du Centre de recherche sur le cancer de l’Université Laval.
La recherche n’était pas sa seule passion. Il a constamment fait preuve d’un grand engagement dans son milieu et a toujours été habité par une vocation académique. Ses actions démontraient qu’il se considérait comme un chercheur, mais aussi comme un professeur. Ceci est en cohérence avec la raison d’être de l’axe Oncologie, qui est d’assurer le plein potentiel de la recherche et de la formation sur le cancer. Dès son arrivée à l’Université Laval, Normand devient membre du Comité de programme en médecine expérimentale aux 2e et 3e cycles, pour ensuite y assumer la fonction de secrétaire, de 1976 à 1979, puis de directeur, de 1978 à 1986. Pendant la même période, il a piloté la restructuration des programmes de 2e et 3e cycles à la Faculté de médecine, en lien avec son mandat comme président du Comité de la recherche et des études avancées. Il s’est fortement impliqué dans l’enseignement et était coresponsable des cours « La Cellule : régulation moléculaire et dynamique structurale » et « Fondements cellulaires et moléculaires du cancer » pour les programmes de 2e et 3 cycles de biologie cellulaire et moléculaire, avec les professeurs Josée Lavoie et Jacques Huot. Il a également été membre de jury de plusieurs mémoires de maîtrise et de thèses de doctorat, à l’Université Laval, au Québec et au Canada. Soulignons qu’il a été un membre très actif au sein de différents comités institutionnels et facultaires, entre autres la Commission de la recherche, le Comité conseil de la bibliothèque, ainsi que le Comité du recteur – Prix et distinctions.
Finalement, Normand Marceau a été membre ou président de nombreux comités d’évaluation par les pairs, tels que le Fonds de recherche du Québec, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), la Société de recherche sur le cancer, le Conseil de recherches médicales et le Fonds pour la Formation de chercheurs et l’aide à la recherche. Il a su gagner le respect de ses collègues comme évaluateur rigoureux, respectueux, et ayant une connaissance approfondie de ses dossiers. Ce fut un honneur de siéger à ses côtés sur ces comités. Il a également exercé la fonction de délégué des IRSC à l’Université Laval de 1996 à 2006. Par ailleurs, il a été très actif au sein de la Société canadienne de biologie cellulaire et moléculaire durant la période de 1976 à 1995 ; non seulement en tant que membre, mais également à titre de président. Il en fut de même pour ses trois participations à l’Acfas comme membre du Conseil d’administration et du Comité de Prix Léo-Parizeau, ainsi qu’aux Prix du Québec Wilder-Penfield.
Normand fut un collègue et ami respecté et aimé. Sa joie de vivre, son humour, sa spontanéité et sa très grande sagesse vont grandement nous manquer.
Bon voyage cher ami !
Jacques Huot, Ph.D.
Jacques Côté, Ph.D.
Centre de recherche du CHU de Québec
Faculté de médecine de l’Université Laval