Depuis les deux derniers mois, la course au traitement et au vaccin contre la COVID-19 a fait l’objet d’une importante couverture médiatique. Mais saviez-vous que des chercheurs du Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval s’intéressent aussi à cette pandémie sous un tout autre angle?
C’est notamment le cas de la chercheuse Ève Dubé, qui est aussi professeure invitée au Département d’anthropologie de l’Université Laval et chercheuse à l’Institut national de santé publique du Québec.
Après avoir mené plusieurs projets de recherche en lien avec l’hésitation à la vaccination, la professeure Dubé s’intéresse cette fois à la communication entourant la COVID-19. Désinformation, rumeurs et discours xénophobes sont maintenant au cœur de ses recherches, puisque la pandémie actuelle a donné naissance à une véritable « infodémie », c’est-à-dire une épidémie d’informations, dont la véracité est très variable, et qui empêche la population d’avoir accès à des renseignements fiables par rapport à un enjeu comme la COVID-19 et d’agir en conséquence. Dès le début de la pandémie, toutes sortes d’informations sont apparues sur les médias sociaux, des théories du complot aux discours haineux à l’encontre des communautés asiatiques, des personnes âgées, des jeunes et des voyageurs. Ce sont ces trames narratives et les idées qui se propagent le plus rapidement qui font l’objet des travaux de la chercheuse.
En analysant le contenu des médias sociaux, comme Twitter, ainsi que les fils de commentaires des articles publiés dans les grands médias, Ève Dubé et son équipe comptent, dans un premier temps, brosser un portrait des préoccupations récurrentes au sein de la population. La quantité de données à répertorier et à analyser étant titanesque, la chercheuse aura recours à l’intelligence artificielle.
Dans un deuxième temps, à l’hiver prochain, elle et ses collègues mèneront aussi des entrevues auprès de membres du grand public, dans quatre provinces canadiennes, afin de déterminer si leur interprétation de l’information scientifique en lien avec la COVID-19 a changé. Des professionnels de la santé publique seront aussi consultés afin de mieux comprendre comment ils communiquent à propos de la maladie et les enjeux de communication qu’ils ont rencontrés.
Les résultats de cette recherche permettront de mettre en lumière les forces et les faiblesses des communications des autorités en santé publique en regard de la COVID-19. Puisque la récente situation a nécessité la mise en place de mesures extraordinaires, qui ont été respectées à différents niveaux, déterminer les tenants et aboutissants d’une communication plus efficace pourrait permettre d’optimiser les moyens de transmission des messages dans des situations similaires et ainsi s’assurer que la population a toute l’information nécessaire afin de prendre en
main sa santé et celle des autres. « En collaborant avec des chercheurs de partout au pays et à l’international, nous espérons encourager la population à rejeter les rumeurs sans fondement et à se fier plutôt sur de l’information validée scientifiquement, provenant des autorités de santé publique, qui permettra de sauver des vies », explique la chercheuse.
En plus de ce projet et toujours en lien avec le phénomène d’infodémie, la professeure Dubé collabore aussi avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) à des travaux visant à suivre l’évolution du discours public dans les médias sociaux et traditionnels relativement à des sujets en lien avec la pandémie, comme la source du virus, la maladie, les interventions et les traitements, et ce, à l’international. Chaque semaine, les trames narratives font l’objet d’une analyse afin de documenter les sujets récurrents en utilisant le même modèle que celui du projet canadien.
Là encore, l’objectif est la transmission d’une information juste et fiable, car bien que la course au vaccin soit l’un des grands enjeux de la pandémie, c’est aussi une communication efficace qui permettra d’assurer le succès de cette stratégie de santé publique.